TRIBUNE – Le Zéphyr propose des cartes blanches aux citoyens qui se mobilisent au quotidien pour le vivant, des scientifiques qui parlent de leur recherche, des membres d’associations ou encore de fondations qui s’expriment sur leur engagement.

« L’océan est en mauvaise santé du fait de nos activités humaines, et il convient d’y remédier d’urgence, indique dans une tribune Carole Saout-Grit, océanographe physicienne, dirigeante et fondatrice de Glazeo et du média Océans connectés. Il est essentiel que les politiques soutiennent l’océanographie sur le long terme. »

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La 3ème conférence mondiale des Nations Unies pour l’Océan a battu son plein à Nice, et avec elle son lot de discours, de déclarations, de selfies et autres communications par l’image.

Les mots sont souvent clinquants et les phrases affirmatives pour espérer une dynamique collective internationale de protection des océans. Et pourtant… L’objectif de limiter le réchauffement à +1,5 °C n’est toujours pas atteint dix ans après l’avoir annoncé, il semble même s’éloigner. Nos pollutions multiples et les menaces sur les écosystèmes marins n’ont jamais autant pesé, encouragées par certains lobbys économiques et politiques, et de trop nombreux calculs de profit à court terme.

Manque de considération des experts

Durant une semaine, le colloque scientifique du One Ocean Science Congress (OOSC) a précédé cette réunion des 56 chefs d’État et de gouvernement. À lui seul, il a réuni plus de 2 000 scientifiques. Leur constat est unanime pour dire et redire que les résultats scientifiques sont établis depuis longtemps dans de nombreux rapports mis à la disposition des décideurs politiques.

Toutes les études confirment que l’océan est en mauvaise santé du fait de nos activités humaines, et qu’il y a urgence à y remédier en encadrant et en légiférant nos pratiques et nos usages de la mer, pour en interdire certaines et en privilégier d’autres.

En même temps, la communauté scientifique est bien soucieuse du sens donné à ses travaux de recherche sur l’océan, de la remise en cause des financements de la recherche scientifique publique française et internationale, et du déni démocratique qui est fait de la véracité de la parole scientifique. Tous les chercheurs s’alarment surtout du manque de considération de leurs avis d’experts dans les décisions politiques. Il manque à l’océan une voix de la polis (de la cité) pour mettre en œuvre chacune des solutions d’adaptation et d’atténuation préconisées par les scientifiques, et nécessaires au développement durable du milieu marin et de ses habitants.

Les scientifiques ont largement fait leur part

L’océanographie rassemble de nombreuses disciplines (biologie, physique, chimie, géologie…) qui n’ont pas toutes évolué au même rythme au fil des siècles. Mais les connaissances scientifiques sur l’océan ont toutefois connu une accélération après-guerre, grâce aux révolutions technologiques et numériques et à la mise en œuvre de nouveaux moyens d’observation en mer et par satellites, complétés par l’arrivée de nouveaux outils numériques.

Si l’on sait ce que l’on sait aujourd’hui sur l’état de santé de l’océan, si les messages portés par les scientifiques sont si alarmants, c’est grâce à quatre décennies d’efforts de recherche et de coopérations internationales. Aujourd’hui, pour que ces efforts ne soient pas vains et parce que le climat s’observe sur une échelle d’au moins trente ans, il est essentiel que les politiques soutiennent l’océanographie sur le long terme. Il faut donner aux chercheurs le temps et les moyens d’observer, de mesurer, d’analyser, de décrypter, de comprendre et d’élucider pour mieux prévoir et alerter.

En ces temps agités de bouleversements sociaux et démocratiques, la volonté politique doit fixer un cap. Notre société a besoin d’une recherche publique forte et indépendante pour renforcer le socle de nos connaissances. Protéger ce bien commun qu’est l’océan implique de décrypter le fonctionnement complexe et les équilibres subtils de la planète et de ses différentes composantes. Éclairer les décisions et guider la société vers une planète durable implique une intelligence collective, des ressources, de la patience et de la modération.

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Tisser des liens de confiance entre sciences et société pour agir

Un mouvement collectif pour sauver les océans est encore possible à condition d’ouvrir les portes des laboratoires et de partager les connaissances scientifiques avec le plus grand nombre. Comme le dit si bien Erik Orsenna, écrivain philosophe et académicien passionné de mer que j’admire : « Pour respecter il faut aimer, mais pour aimer il faut connaître. » Il en va de son prochain comme de l’océan !

La science ne vaut que si elle est partagée et mise au service de la société, en particulier de ses populations les plus vulnérables. Les démarches de vulgarisation des sciences sont à multiplier pour permettre la compréhension par tous des enjeux environnementaux liés aux océans et à l’équilibre de notre planète. Certains chercheurs ont commencé à prendre ce chemin du partage.

Ils le font souvent par envie ou par conviction, même si cette activité n’est pas toujours reconnue dans leurs rapports d’activité annuels. On peut également se réjouir de voir certains instituts communiquer de plus en plus largement depuis quelques années, multipliant les supports et les canaux de diffusion. Mais plutôt que de travailler chacun dans son couloir de nage, pourquoi ne pas unir nos forces autour d’un outil global de vulgarisation et de partage ?

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L’envie de s’émerveiller

C’est en partant de ce constat que j’ai imaginé Océans connectés en 2021. Océans connectés est un nouveau média numérique indépendant et entièrement dédié aux sciences de la mer. En s’appuyant sur la communauté scientifique et ses références, le média porte l’ambition de créer une plateforme de confiance qui donne la garantie d’informations vérifiées et robustes liées à l’océan. En diffusant le fait scientifique de manière large et vulgarisée, l’information devient accessible au plus grand nombre et permet de redonner à chacun l’envie de savoir, de s’émerveiller et d’avoir les clés pour comprendre et agir.

Bien au-delà d’être un outil d’information, Océans connectés veut tisser des liens de confiance entre la cité et les scientifiques de la mer. En même temps qu’elle offre aux océanographes plus de visibilité pour plus d’impact, cette nouvelle vitrine répond à un besoin de société en devenant un nouveau lieu d’échanges et de rencontres. Il ouvre un nouveau cercle vertueux, qui remet la science au cœur du processus d’éducation et de sensibilisation. La connexion entre les acteurs et les projets est un levier puissant pour l’innovation et l’action, et une étape nécessaire au développement et à l’hybridation des financements de la recherche scientifique demain.

Construire ensemble une culture scientifique commune et partagée des océans est la clé pour éduquer, sensibiliser et ainsi imaginer ensemble les solutions pour agir et protéger notre planète durablement. Océans connectés se veut être le nouveau porte-voix des océans au sein de la cité, et affirmer haut et fort le besoin d’agir. / Carole Saout-Grit

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