Ils ont créé un supermarché radicalement différent, qui privilégie le circuit court et finance les petits producteurs au juste prix. Mais pour en profiter les consommateurs devront y travailler quelques heures. Rencontre de trois membres de La Chouette Coop.

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Pendant un mois, elle a évité la cohue des supermarchés. Pendant un mois, elle a boycotté les grandes surfaces et s’est nourrie… autrement. La journaliste du Figaro Mathilde Golla a testé, durant quatre semaines, des solutions alternatives pour se procurer les produits du quotidien. Pari réussi, pour cette spécialiste de la conso’ alternative. Elle explique même, sur les ondes de France Inter, ne pas avoir dépensé plus d’argent. AMAP, jardins de Cocagne, sites de ventes en ligne, drive fermiers… Elle affirme qu’il est tout à fait possible de vivre sans la grande distribution. Un peu partout en France, des citoyens abondent en ce sens et tentent d’essaimer un concept de… supermarché alternatif et coopératif, né il y a plus de 40 ans aux Etats-Unis – à Brooklyn, où s’est développée une grande surface pas comme les autres, au doux nom de Parc Slope Food Coop.

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Sur place, les consommateurs mettent dans le caddie des produits issus d’un circuit court, mais surtout moins chers qu’ailleurs, puisqu’il n’y a pas eu d’intermédiaire à rétribuer. Ses clients piochent moins dans le portefeuille, et, en retour, mettent la main à la pâte au moins trois heures par mois. Pour que ça fonctionne, chacun s’y met. Les uns déchargent les camions, rangent les rayons et les autres encaissent. Et ça plaît puisqu’ils sont plus de 16 000 à avoir sauté le pas. Les missions bénévoles sont remplies par des instituteurs, des travailleurs sociaux, des conducteurs de métro, explique Tom Boothe dans un documentaire sur le food coop new-yorkais. Cet Américain francophile filme un local noir de monde, des clients adhérents qui patientent, les queues qui s’allongent. Mais pas de panique : le PSFC, de son petit nom, a tout prévu, il édite un magazine pour les… faiseurs de queue. Patienter, oui, mais pas sans rien faire…

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Le projet « mère »

Et lui non plus n’a pas rien fait, il a reproduit le modèle et a ouvert La Louve à Paris, entouré de 3 000  membres fidèles. « La Louve a ouvert la voie des supermarchés coopératifs en France. Nous l’avons nommée, dans notre jargon coopératif, le projet « mère », les autres projets, sont les projets « sœurs » », nous explique Chrystel Gérard, de La Chouette Coop (LCC), à Toulouse. Les “chouettos”, comme ils se nomment, n’ont pas encore de local  pour le supermarché, mais ont démarré l’aventure – fin 2015 – dans la ville rose. Ils commandent en ligne les produits voulus et les récupèrent au local du collectif. Pour l’instant, ils bénéficient de plus de 300 références, « proposées à des prix plus intéressants que dans certaines enseignes (- 20 %) », assure Chrystel Gérard. « À terme, poursuit-elle, les produits seront identiques à ceux proposés par un supermarché classique. » Bien qu’elle propose quelques articles conventionnels, la grande majorité des produits sont issus de la filière biologique.

« Solidarité et faire ensemble »

« Rejoindre le projet était pour moi une évidence, explique Olivier, l’un des 470 « chouettos », qui a déjà intégré une AMAP depuis sa création il y a 11 ans. J’oriente mes choix vers une consommation plus responsable. » Et cela va bien au-delà de l’alimentation, puisqu’il s’est inscrit à Enercoop pour l’électricité et a ouvert un compte auprès d’une banque coopérative.

« Père de deux enfants, je me préoccupe de l’état du monde que nous leur laisserons ; cela oriente de plus en plus ma vie et il me semble important d’agir concrètement par nos choix de consommation – cela pèse, analyse-t-il, avant de préciser être satisfait de travailler avec ses collègues : « Partager un but et se reconnaître dans un mouvement en marche aide à dépasser beaucoup de difficultés…  » Tariq, un autre coopérateur, embraye : « Personnellement, j’ai de suite été séduit par l’esprit et les valeurs défendues par La Chouette Coop. Le partage, la solidarité et le faire ensemble sont au cœur de ce projet et ça fait du bien ! » / Philippe Lesaffre

Actuellement, quatre supermarchés coopératifs sont en campagne de financement participatif : La Chouette Coop à Toulouse, Supercoop à Bordeaux, La Cagette à Montpellier et Otsokop à Biarritz.